Vingt ans d’avancées pour protéger les mères et leurs bébés du VIH

03 novembre 2021

Cette année marque le 20e anniversaire du Fonds mondial, une occasion de se rappeler l’impact du partenariat et d’en faire davantage pour mettre un terme aux maladies infectieuses les plus meurtrières au monde, et de se préparer pour les pandémies à venir.

La différence d’âge de seulement quatre ans entre Aaliyah Westerhof, 18 ans et Winnie Xinwa, 22 ans peut sembler insignifiante. Pourtant, parce que ces deux filles sont nées de mères séropositives à une époque où les médicaments appuyant la prévention de la transmission de la mère à l'enfant (PTME) commençaient seulement à être disponibles, leur faible différence d’âge a eu des conséquences qui ont bouleversé leurs vies.

Winnie, trois ans, avec sa mère Elsie dans leur ville natale à Hartebeesfontein, Afrique du Sud, en 2002. Winnie Xinwa

Lorsque Winnie est née, en 1999, les médicaments appuyant la PTME n’étaient pas disponibles en Afrique du Sud. Quatre ans plus tard, Aaliyah naissait au Zimbabwe, elle aussi d’une mère séropositive, mais elle a pu avoir accès au traitement.

La mère d’Aaliyah, Tendayi, s’estime encore chanceuse aujourd’hui d’avoir été en mesure de protéger sa fille. « Lorsque j’ai appris que ma fille était séronégative, au début, je n’y ai pas cru. Puis j’étais sur un petit nuage, dit-elle. C’était la plus belle chose – c’était une nouvelle vie. »

En raison du rejet social associé au VIH, les parents de Winnie ne lui ont fait part de son statut sérologique qu’à l’âge de 15 ans, après qu’elle a refusé de prendre son traitement quotidien. Dès qu’elle a su qu’elle vivait avec le VIH, elle a recommencé à suivre son traitement antirétroviral.

« J’étais alors en meilleure santé et plus heureuse, dit-elle. Ils n’avaient pas pu me protéger à la naissance parce qu’ils n’avaient pas eu accès à la PTME, mais avec le traitement, j’avais une deuxième chance. »

Aaliyah, huit ans, et sa mère Tendayi à Harare, Zimbabwe, en 2011. Aaliyah Westerhof

S’unir pour empêcher les nouveau-nés de contracter le VIH

Les avancées pour réduire la transmission du VIH de la mère à l’enfant ont été spectaculaires au cours des vingt dernières années, mais garantir que ces médicaments vitaux soient disponibles et accessibles pour les femmes qui en ont le plus besoin a été une lutte de longue haleine qui continue encore aujourd’hui.

D’après l’OMS, seulement 11 % des femmes séropositives en Afrique de l’Est et australe, et seulement 1 % des femmes séropositives en Afrique de l’Ouest et centrale avaient accès aux médicaments pour protéger leurs bébés du VIH pendant la grossesse en 2004.

Les femmes ont été laissées de côté pour de nombreuses raisons, y compris le manque d’accès au dépistage, les médicaments onéreux, le rejet social et la discrimination et dans certains cas, les obstacles politiques.

Par exemple, au début des années 2000, le gouvernement d’Afrique du Sud n’acceptait pas que le VIH soit une infection qu’il était possible de traiter. Le gouvernement avait mis en place des politiques pour empêcher la distribution d’antirétroviraux, y compris aux femmes enceintes, et bloqué les subventions du Fonds mondial et d’autres organisations internationales.

Grâce aux efforts inlassables de la société civile, des militants et des agents de santé, un procès s’est tenu devant la plus haute cour du pays. Les militants ont gagné et il a été ordonné au gouvernement de rendre le traitement appuyant la PTME disponible dans tous les établissements de santé publics du pays.

Linda Mafu, la directrice du Département du plaidoyer politique et de la société civile du Fonds mondial faisait partie de ce mouvement.

« Lorsque nous avons su que nous avions remporté le procès, nous étions fous de joie, c’était un moment incroyable, a dit Linda Mafu. Parce que vraiment, la pire chose à voir, c’est une mère qui perd son enfant. Remporter ce procès a été un tournant décisif de la lutte contre le VIH. »

Winnie, 19 ans, et sa mère Elsie à Klipgat, Afrique du Sud, en décembre 2020. Winnie Xinwa

Vingt ans d’investissements visant à protéger des millions de femmes et d’enfants

Au cours des vingt dernières années, le Fonds mondial a investi 24,4 milliards de dollars US en faveur de programmes de lutte contre le VIH, qui couvrent désormais 122 pays. Les programmes visant à protéger les mères et les enfants du VIH ont été une composante essentielle de ces investissements.

Aujourd’hui, les interventions visant à empêcher les femmes de transmettre le VIH à leurs enfants sont intégrées au traitement, à la prévention et au diagnostic ainsi qu’aux programmes visant à autonomiser les adolescentes et les jeunes femmes et à renforcer les systèmes de santé. En travaillant étroitement avec les communautés, ces interventions visent à atteindre les femmes qui courent le plus grand risque et qui sont les plus difficiles à atteindre.

Ces investissements ont eu un impact considérable.

Dans les pays soutenus par le Fonds mondial, le pourcentage de mères recevant un traitement pour prévenir la transmission du VIH à leurs bébés a atteint 85 % en 2020, contre 44 % en 2010.

De plus, au cours des vingt dernières années dans les pays soutenus par le Fonds mondial, plus de 7 millions de mères séropositives ont bénéficié de médicaments les maintenant en vie et empêchant la transmission du VIH à leurs bébés. En 2020 seulement, nous avons pu atteindre 686 000 femmes.

Des investissements nécessaires pour atteindre les plus vulnérables

Malgré ces avancées considérables, il y a encore environ 180 000 femmes enceintes laissées de côté qui ne reçoivent pas de traitement pour protéger leurs nouveau-nés. Et parmi les femmes qui reçoivent un traitement pendant la grossesse, beaucoup ne le poursuivent pas pendant l'allaitement, ce qui met leurs enfants en danger.

En 2020, il y avait 150 000 nouveaux cas de VIH chez les enfants – cela représente environ 410 enfants infectés par le VIH chaque jour.

Le COVID-19 nous a également fait faire marche arrière sur certaines des avancées réalisées, le nombre de mères bénéficiant de la PTME ayant chuté de 4,5 % en 2020 par rapport à l'année précédente.

Aujourd'hui, les outils existent pour garantir que chaque nouveau-né soit protégé du VIH, mais ils doivent être étendus pour atteindre les femmes qui en ont le plus besoin.

Parmi ces outils, certains permettent de veiller à ce que les femmes aient accès à l'éducation, aux préservatifs et aux médicaments pour prévenir le VIH, à la planification familiale pour éviter les grossesses non planifiées ainsi qu'au dépistage et au traitement du VIH et à des soins maternels et néonatals de bonne qualité.

Aaliyah et sa mère Tendayi il y a deux ans, à Harare, Zimbabwe. Aaliyah Westerhof

Un avenir radieux pour les deux filles

Bien que les vies de Winnie et d'Aaliyah aient commencé si différemment, les deux filles connaissent toutes deux une tournure heureuse aujourd’hui.

Aaliyah vit et étudie aux Pays-Bas dans le but de devenir infirmière, expliquant qu'elle veut une carrière lui permettant d’aider les gens. Quant à Winnie, elle consacre la majeure partie de son temps à informer les jeunes sur le VIH et la prévention, principalement par le biais de sa chaîne YouTube.

« Certaines personnes se disent que la vie s’arrête après un dépistage dont le résultat est positif, dit Winnie. Je veux qu’elles sachent qu’il y a toujours une vie, après avoir été testé positif. »