Année après année, de nouvelles technologies révolutionnaires occupent davantage le devant de la scène.
En novembre 2022, l’outil d’intelligence artificielle (IA) ChatGPT faisait la une à travers le monde. En janvier 2023, il comptait plus de 100 millions d’utilisateurs et des dizaines de modèles concurrents. L’IA était au cœur des discussions des chefs d’État à la COP28 et au Forum économique mondial 2024, à Davos.
Des outils tels que l’IA – développés par des partenaires du secteur privé et exploités par les gouvernements et des partenaires de la société civile – pourraient redessiner notre réponse au changement climatique et aux inégalités économiques.
Et s’ils pouvaient changer notre façon de combattre les maladies infectieuses mortelles et d’apporter des soins vitaux à celles et ceux qui en ont le plus besoin ?
Ils le peuvent, et c’est ce qui est déjà en train de se passer.
La tuberculose est une maladie évitable et curable, qui tue chaque jour plus de 3 000 personnes. Nous savons pourquoi et comment elle se propage. Les schémas thérapeutiques existants sont extrêmement efficaces et des médicaments plus nombreux et plus adaptés sont mis sur le marché de nombreux pays. Pourtant, en 2022, la tuberculose a fait 1,3 million de victimes dans le monde.
Cela ne peut plus durer.
Dans les pays où le Fonds mondial investit, des partenaires des secteurs publics et privés œuvrent aux côtés des communautés pour développer et mettre en application les outils innovants de la riposte, et abattre les obstacles qui entravent les efforts pour mettre fin à la tuberculose.
Récemment, lors d’un voyage au Bangladesh, j’ai rencontré le personnel de santé œuvrant au sein de structures publiques, privées et communautaires qui combinent radiographie numérique, IA et télémédecine pour dépister rapidement la tuberculose. Lorsque les résultats sont positifs, les patients fournissent des échantillons d’expectoration sur place pour analyse et reçoivent un traitement au niveau communautaire. Ces services sont fournis gratuitement.
On retrouve ce type d’initiative partout dans le monde.
Dans la province du Penjab au Pakistan, Mercy Corps utilise l’IA pour identifier des « zones sensibles » – c’est-à-dire des lieux éloignés ou ruraux où les personnes atteintes de la tuberculose pourraient ne pas être dépistées – et organise des campements sanitaires mobiles pour fournir des services de lutte contre la tuberculose au plus près des habitants.
À la prison Padre de la Vega, au Paraguay, les agentes et agents de santé couplent des appareils de radiographie portables ultralégers Fujifilm à la technologie de l’IA pour dépister la tuberculose rapidement et la diagnostiquer de manière plus fiable afin que les patients puissent être traités et ne propagent pas la maladie.
Au Cambodge, les médecins du Centre national de contrôle de la tuberculose et de la lèpre apportent des appareils de radiographie portables Delft dans les provinces voisines pour dépister les personnes qui ne peuvent pas se rendre à Phnom Penh, la capitale.
Enfin, en Indonésie, un nouveau partenariat entre le Fonds mondial, Siemens Healthineers et le programme national de lutte contre la tuberculose s’attache à intensifier la recherche active de cas en appliquant l’apprentissage profond, un sous-domaine de l’IA, à la radiographie et en permettant à des radiologues expérimentés d’étudier les images à distance pour étendre la portée géographique du dépistage, du diagnostic et du traitement de la tuberculose et en faire bénéficier un plus grand nombre de personnes.
De telles interventions, novatrices et ciblées, peuvent contribuer à éliminer les inégalités persistantes inhérentes à la maladie : pauvreté, déplacements liés aux conflits et aux catastrophes météorologiques, surpeuplement, manque de temps et d’accès aux structures de santé.
Par ailleurs, elles établissent les bases de systèmes de santé résilients, répondant aux besoins individuels.
En plus du dépistage de la tuberculose, les campements sanitaires mobiles du Pakistan fournissent des services de santé essentiels, en particulier aux femmes et aux jeunes enfants. L’accès à la radiographie dans les prisons du Paraguay aide à limiter le risque inquiétant de contracter la tuberculose dans les établissements carcéraux. Au Cambodge, la stratégie « double XX » – appareil de radiographie (à rayons X) couplé à l’analyse des échantillons d’expectorations sur une plateforme GeneXpert – identifie rapidement des personnes atteintes de la tuberculose qui pourraient sinon passer entre les mailles du filet.
Ces exemples soulignent en outre l’importance vitale de la coopération entre les entreprises, les leaders du marché, les gouvernements et les prestataires de santé locaux dans le but de trouver des solutions créatives à des problèmes qui peuvent être résolus.
Le problème de la tuberculose peut être résolu.
Le Fonds mondial assure la plus grande part – 76 % – du financement international des programmes de lutte contre la tuberculose. Il est également l’un des principaux investisseurs multilatéraux dans les systèmes de santé numérique. Le partenariat consacre plus de 150 millions de dollars US par an à de nouveaux outils numériques favorisant l’équité et permettant d’atteindre les communautés les plus éloignées.
Mais ce n’est pas suffisant.
Nous avons besoin de partenaires engagés qui nous aident à imaginer et élaborer des outils de pointe pour progresser vers l’objectif de mettre fin à la tuberculose dans le monde.
Nous devons maintenir notre participation significative auprès des communautés pour concevoir des interventions sur mesure efficaces et pérennes, et les aider à anticiper de nouvelles menaces sanitaires, comme des pandémies ou la résistance aux antimicrobiens.
Dans notre monde en constante mutation – riche d’idées et de technologies nouvelles, inimaginables il y a seulement quelques années – tout cela est possible.
Ensemble, nous pouvons mettre fin à la tuberculose. Une bonne fois pour toutes.
Cet article d’opinion a été publié pour la première fois sur Project Syndicate.