Le chemin vers la préparation aux pandémies se trouve juste sous nos yeux

Le 27 mai 2024 par Shunsuke Mabuchi, directeur des Systèmes résistants et pérennes pour la santé et de la Préparation aux pandémies au Fonds mondial

パンデミックへの見えざる備え
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La « préparation et la riposte aux pandémies » ne relevait pas de mes compétences lorsque j’ai pris mes fonctions au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, en 2022.

J’ai été engagé pour mener les travaux de l’organisation sur le renforcement des systèmes de santé dans les 120 pays où le Fonds mondial investit. (Des capacités de soins de santé solides contribuent à mettre fin au VIH, à la tuberculose et au paludisme en tant que menaces pour la santé publique, et permettent d’obtenir de meilleurs résultats en matière de santé et de dispenser des services de santé de façon pérenne.) Le Fonds mondial investit depuis plus de 20 ans dans le renforcement des systèmes de santé et communautaires.

À l’époque, il n’existait pas de lien entre la préparation à la prochaine menace de pandémie et l’établissement de systèmes de santé résistants et pérennes.

Pourtant, ils sont directement liés.

Le renforcement des systèmes de santé constitue en réalité le fondement de la prévention, de la préparation et de la riposte aux pandémies de demain ; nous les avons donc associés. Au cours des trois prochaines années, le Fonds mondial va investir plus de 6 milliards de dollars US (aucun autre bailleur de fonds multilatéral n’investit plus que le Fonds mondial dans des subventions pour les systèmes de santé et communautaires) dans le renforcement des systèmes de santé et dans la préparation et la riposte aux pandémies dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Parce que des systèmes de santé solides dans tous les pays, et pas seulement dans les pays riches, sont absolument essentiels pour faire face à la prochaine menace de pandémie.

Quelle que soit la nature de la prochaine pandémie – maladie zoonotique émergente, flambées d’une épidémie existante (comme le paludisme) dans de nouvelles régions ou encore résistance aux antimicrobiens –, elle ne s’arrêtera pas aux frontières nationales. Comme nous l’avons vu avec le COVID-19, personne n’est à l’abri.

J’ai grandi au Japon, pays ayant prouvé que la lutte contre une maladie infectieuse présente beaucoup plus d’avantages que la simple éradication de cette maladie. Car une telle lutte conduit aussi à la création de systèmes de santé résistants et véritablement universels.

Au début des années 1950, le Japon s’est lancé dans un ambitieux projet national de lutte contre la tuberculose, sa première cause de mortalité à l’époque, combinant les dernières innovations scientifiques, la mobilisation communautaire, la participation du secteur privé et une détermination à atteindre les communautés les plus marginalisées. En fait, un bon nombre des approches qui sont considérées comme novatrices dans les systèmes de santé d’aujourd’hui, comme la consultation au niveau local pour renseigner l’élaboration des politiques globales, la direction de la recherche des cas par les groupes locaux et le dépistage obligatoire dans le milieu professionnel, ont été développées il y a des décennies au Japon.

L’approche du Japon a non seulement abaissé de façon spectaculaire les infections tuberculeuses et les décès, mais elle a également constitué le fondement de la couverture sanitaire universelle – un système de santé complet, à la portée de toutes et de tous et résolument axé sur la santé publique. Le système de santé japonais intervient tôt, suit les patients de près et, surtout, vise à ne laisser personne de côté. Aucun système n’est parfait, mais les succès remportés par le Japon sur le COVID-19 ont démontré la pertinence de l’approche du pays. En concentrant tous les efforts pour lutter contre une maladie, le système de santé dans son ensemble devient plus puissant, et suffisamment agile pour faire face à une nouvelle menace.

Nous savons que cette approche fonctionne.

Dans les pays où le Fonds mondial investit, les mêmes outils que ceux mis en place pour lutter contre la tuberculose ont été utilisés pour lutter contre le COVID-19. Si vous contractiez le COVID-19 en Indonésie, par exemple, l’agent de santé vous faisait passer un test de dépistage du virus SARS-CoV-2 à l’aide d’un équipement conçu à l’origine pour dépister la tuberculose. Les résultats du test étaient ensuite analysés dans un laboratoire construit grâce aux investissements destinés à la lutte contre la tuberculose. Le dépistage intégré, qui consiste à dépister plus d’une maladie à la fois, est en voie de devenir le principe de base des plans de préparation et de riposte aux pandémies de nombreux pays, et a joué un rôle clé dans l’intensification du dépistage de la tuberculose. C’est en se concentrant sur la personne, et non sur la maladie, que l’on peut véritablement se préparer aux pandémies.

Grâce à un solide système de gestion de l’information sanitaire mis en place pour soutenir la surveillance de la tuberculose, le pays a également pu recueillir des données permettant de mieux comprendre la répartition des cas de COVID-19 et de réagir en conséquence en établissant des stratégies de prévention et de traitement éclairées.

Alors que les partenaires de la santé mondiale se réunissent cette semaine dans le cadre de l’Assemblée mondiale de la Santé pour étudier l’Accord sur les pandémies, gardons une chose à l’esprit : à l’avenir, le financement de la prévention, de la préparation et de la riposte aux pandémies doit être intégré dans les systèmes de santé existants et les interventions de lutte contre les maladies afin de maximiser l’efficacité, la pérennité et l’équité.

C’est la seule voie possible vers un monde en meilleure santé et plus sûr pour toutes et tous.