Assemblée générale des Nations Unies : les progrès de la santé mondiale sont le gage d’un monde plus sûr

Le 19 septembre 2024

Les délégations du monde entier se réunissent cette semaine à New York pour l’Assemblée générale des Nations Unies, et la place qui y est accordée aux nombreuses crises qui ébranlent actuellement le monde met en lumière une incontournable réalité : ces crises et la santé mondiale sont inextricablement liées. En effet, plusieurs des événements clés de l’Assemblée générale – à commencer par la réunion de haut niveau sur la résistance aux agents antimicrobiens et le Sommet de l’avenir, qui vise un engagement renouvelé envers les objectifs de développement durable (ODD) – signalent à quel point il devient urgent non seulement de réagir aux crises sanitaires en cours, mais surtout de s’attaquer à leurs causes sous-jacentes.

Qu’il s’agisse du changement climatique qui déracine des communautés et les expose aux maladies, ou de la résistance aux antimicrobiens qui sape des décennies de progrès médicaux, les défis auxquels nous sommes confrontés sont complexes et interdépendants. Heureusement, nous avons retenu les leçons de la lutte contre les maladies infectieuses les plus meurtrières. Au cours des deux dernières décennies, les investissements dans la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme et dans l’amélioration des systèmes de santé et communautaires au sein des pays à revenu faible et intermédiaire ont sauvé des millions de vies et contribué au développement d’un monde plus équitable. Cette expérience démontre que la santé mondiale est le gage d’un monde plus sûr et plus stable.

Les efforts de lutte contre les trois maladies déployés à l’échelle mondiale ont eu un impact remarquable au cours des deux dernières décennies. En 2001, l’année précédant la création du Fonds mondial, le sida, la tuberculose et le paludisme ont fait 4,6 millions de victimes, un chiffre effarant. Selon un nouveau rapport du Fonds mondial, le nombre de victimes a diminué de presque moitié, soit 2,4 millions. Globalement, les inégalités entre les pays dans l’espérance de vie ont diminué d’un tiers entre 2002 et 2019. On attribue la moitié de cette diminution à la baisse de la mortalité du VIH, de la tuberculose et du paludisme.

Le nouveau rapport montre qu’au cours des deux dernières décennies, les efforts de lutte contre les trois maladies ont sauvé 65 millions de vies dans les pays où le Fonds mondial investit. Le taux de mortalité combiné du sida, de la tuberculose et du paludisme y a baissé de 61 % durant cette période.

San Pedro, Paraguay. Noelia Sosa, Anastacio Dermott et leurs enfants Maria Jose et Isaias devant leur maison. Anastacio, Maria Jose et Isaias ont été testés et traités pour la tuberculose. La famille Dermott Sosa est un exemple de succès du traitement de la tuberculose. Le père est toujours sous traitement, mais ses deux enfants se sont rétablis après un an de traitement. Photo : Le Fonds mondial / Johis Alarcón / Panos

Ce ne sont pas que des chiffres. Chacune des 65 millions de vies sauvées est un membre d’une famille, une amie, un voisin, une enseignante, un employé. Chaque vie sauvée a un effet multiplicateur au sein de familles, de communautés et de nations entières. Chaque infection évitée a des effets positifs qui se répercutent au-delà de la santé des individus : elle allège le fardeau des systèmes de santé, ce qui crée des conditions favorables à la stabilité économique et à la cohésion sociale.

Si sauver des vies est un immense succès en soi, la portée de la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme et du renforcement des systèmes de santé et communautaires est beaucoup plus vaste, et cela a été clairement démontré. Toute réduction marquée de la morbidité liée aux trois maladies se traduit par une diminution de l’absentéisme au travail ou à l’école et par une amélioration globale de la santé et du bien-être des communautés. Par exemple, en 2023 seulement, les investissements dans la lutte contre le VIH ont évité 174 millions de journées d’hospitalisation en lien avec le VIH et 154 millions de consultations ambulatoires dans les pays où le Fonds mondial investit. Cela représente des économies de 9,5 milliards de dollars US.

En dépit des gains durement acquis et d’une remarquable reprise à la suite de la pandémie de COVID-19, la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme est loin d’être terminée. Des crises qui s’entrechoquent entravent le progrès vers l’atteinte de la cible de l’ODD 3 – mettre fin aux trois maladies d’ici 2030 – et menacent de creuser les inégalités de la santé mondiale.

Le changement climatique ébranle les fondations de la santé humaine, plonge des gens dans la pauvreté extrême et occasionne l’émergence et la propagation de maladies infectieuses. Il s’agit du plus grand défi de notre époque pour la santé mondiale, et d’une menace grandissante qui compromet les efforts visant à vaincre les trois maladies.

Village de Sreeula, Bangladesh. Sirajul Islam traverse une zone inondée avec Sumaiya, sa fille de six ans, près de l’endroit où se trouvait leur maison familiale. Chaque année, au Bangladesh, des centaines de milliers de personnes sont forcées d’abandonner leur foyer à la suite de catastrophes climatiques et de se réinstaller dans des villes, où les mauvaises conditions d’hygiène et la promiscuité favorisent la propagation de la tuberculose et d’autres maladies. Photo: © UNICEF / UNI424978 / Sokhin

Dans bien des pays, de violents conflits, des crises humanitaires qui se généralisent et des troubles politiques perturbent les programmes de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme et nuisent au bon fonctionnement des systèmes de santé, avec des conséquences dévastatrices pour les communautés les plus pauvres et vulnérables.

La montée de mouvements concertés anti-droits et anti-genre, parallèlement au rétrécissement des espaces civiques, empêche les personnes les plus vulnérables au VIH, à la tuberculose et au paludisme d’obtenir les services dont elles ont besoin.

La résistance aux antimicrobiens, en émoussant l’efficacité des antibiotiques et des traitements contre le VIH, la tuberculose et le paludisme, augmente les risques pour l’humanité d’être confrontée à des agents pathogènes contre lesquels la médecine ne pourrait rien, ce qui mettrait en péril des milliards de vies.

Ce sont des défis titanesques. Mais les extraordinaires accomplissements de la lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme – des millions de vies sauvées, des moyens de subsistance préservés et des dépenses de santé se comptant en milliards de dollars évitées – prouvent que la lutte contre ces maladies contribue à bâtir un monde plus équitable et mieux préparé à riposter aux menaces sanitaires actuelles et futures.

Dans le contexte actuel de crises qui s’entrechoquent, il est impératif d’intensifier de toute urgence notre riposte au VIH, à la tuberculose et au paludisme et aux autres maladies infectieuses majeures.

La mise en place d’un accès équitable à l’innovation est un élément essentiel de cette riposte. La mise en œuvre de stratégies d’orientation des marchés et est un autre. Ces stratégies, qui garantissent un accès équitable et abordable à grande échelle, font parvenir les innovations biomédicales aux personnes qui en ont besoin, le plus rapidement possible.

Pour accélérer le progrès, nous devons également intensifier considérablement les investissements, réaffirmer les volontés politiques et lever les obstacles liés aux droits humains et au genre qui entravent l’accès à la santé. L’inaction risque de perpétuer la menace des maladies infectieuses, de sacrifier inutilement des vies et de surcharger des systèmes de santé fragiles.

Les débats à l’Assemblée générale des Nations Unies sont une occasion en or de relancer la coopération et la mobilisation internationales. Lorsque les États membres des Nations Unies s’engageront à accélérer le progrès vers l’élimination du sida, de la tuberculose et du paludisme, ils contribueront dans un même temps à la résilience de la santé mondiale et à la préparation des systèmes de santé face à des défis sanitaires en pleine mutation. En prenant des mesures audacieuses dès maintenant, nous pouvons mettre fin à ces maladies et bâtir un monde en meilleure santé, plus sûr et plus équitable pour toutes et tous.

Cet article d’opinion a été publié pour la première fois dans Forbes.