Dans un bâtiment de haute sécurité de Kampala, en Ouganda, un homme dirige un groupe de fins limiers qui enquêtent sur un meurtrier potentiel. Même s’ils abordent leur travail avec la méticulosité d’inspecteurs de police, ce sont en réalité des enquêteurs d’un autre genre. Le professeur Moses Joloba, directeur du Laboratoire supranational de référence en Ouganda, dirige son équipe dans la traque à la tuberculose, la maladie infectieuse la plus meurtrière au monde, qui a tué plus de 1,6 million de personnes sur la planète en 2017.
La tuberculose est une maladie qui ne date pas d’hier, mais il faudra le dernier cri de la technologie moderne en matière de diagnostic pour mettre fin à sa forme épidémique. Certains examens de dépistage de la tuberculose peuvent être compliqués et onéreux à réaliser et nécessitent des installations de laboratoires complexes, dont la technologie est bien plus avancée que ce que la plupart des dispensaires peuvent offrir.
Le Laboratoire supranational de référence en Ouganda joue un rôle essentiel au moment de mettre à disposition de nombreux pays la technologie et la formation nécessaires. Il est « supranational », car il aide 21 pays d’Afrique à mener des examens compliqués de détection de la tuberculose. Il apporte aussi un appui aux laboratoires nationaux de référence pour la tuberculose de ces pays, en les conseillant pour qu’ils obtiennent une accréditation de l’OMS. Ce travail fait de l’Ouganda le fer de lance de la sécurité sanitaire en Afrique.
« Nous servons de vitrine. Il s’agit d’un apprentissage par les pairs grâce auquel les pays qui se heurtent aux mêmes difficultés que nous peuvent apprendre de notre expérience », explique le professeur Joloba. « Les référents pour la tuberculose viennent ici, nous les formons, nous les guidons et nous les mettons au défi. Ils rentrent dans leur pays motivés et plus autonomes. »
Le travail du laboratoire qu’il dirige aide de nombreux pays d’Afrique à mettre en place une lutte solide contre la tuberculose, tout en les conseillant pour bâtir des systèmes de santé résistants et pérennes. De plus, des experts du laboratoire ougandais sont envoyés dans d’autres pays et apportent leur aide au personnel de leurs laboratoires.
Ce programme est mené en association entre le Laboratoire national ougandais de référence pour la tuberculose, la Communauté sanitaire d’Afrique orientale, centrale et australe (ECSAHC) et le Fonds mondial. Le Fonds mondial apporte le financement, l’ECSAHC est le principal administrateur de la subvention et le Laboratoire national ougandais pour la tuberculose mène les activités scientifiques. En rassemblant des compétences techniques, financières et logistiques, ce partenariat redéfinit la lutte contre la tuberculose en Afrique.
En devenant une institution de référence supranationale, le laboratoire d’Ouganda a rejoint deux autres structures de ce genre en Afrique, une en Algérie et l’autre en Afrique du Sud. Cinq ans après avoir obtenu son accréditation, il a mis en place un solide réseau de laboratoires dans la région en vue d’améliorer les services, d’apporter un soutien technique et de former les techniciens de laboratoire.
À l’heure actuelle, le laboratoire d’Ouganda soutient les pays suivants : Kenya, Eswatini, Somalie, Érythrée, Tanzanie, Maurice, Sud-Soudan, Angola, Rwanda, Namibie, Zambie, Zimbabwe, Botswana, Seychelles, Mozambique, Malawi, Burundi, Lesotho, Liberia et Djibouti.
Quatre de ces pays – le Mozambique, la Tanzanie, la Namibie et le Kenya – ont désormais reçu une accréditation de l’OMS.
Ce succès a eu pour corollaire d’entraîner une baisse des échantillons reçus et analysés en provenance des autres pays. Il y a plus de laboratoires dans la région qui sont capables de se débrouiller et de réaliser eux-mêmes les analyses dans leur propre pays. Aujourd’hui, seuls 10 pour cent, environ, des échantillons analysés ne proviennent pas d’Ouganda, une évolution qui ravit le professeur Joloba.
« Nous sommes heureux de constater que davantage de pays sont tout à fait capables de réaliser leurs propres analyses, explique-t-il. Nous voulons arrêter d’analyser des échantillons en provenance d’autres pays. Notre objectif est d’amener ces pays à ne plus dépendre de nous. »
Diana Atwine, la Secrétaire permanente du Ministère de la Santé d’Ouganda, n’a que des louanges à adresser pour l’action menée par le laboratoire et son personnel. « Le laboratoire de tuberculose ne se contente pas de nous offrir des services hyperspécialisés, puisqu’il diffuse également les meilleures pratiques en Afrique de l’Est et au-delà, indique-t-elle. Il a guidé les techniciens de laboratoire de ce pays et de toute la région et propose des services, une formation et des recherches de premier plan. »